Sommeil et Poids : Dormir peu pourrait faire grossir
C’est bientôt la fin de l’année, tout le monde est souvent fatigué à cette période. Avez-vous déjà imaginé que le manque de sommeil pourrait avoir des impacts sur votre santé ? On parle souvent de « sommeil réparateur » après une bonne nuit. En effet, plusieurs conséquences du manque de sommeil sont la mauvaise humeur, un travail moins productif et une baisse de l’attention (Alhola 2007). Le sommeil joue aussi un rôle dans l’apprentissage, la mémorisation et la croissance. D’ailleurs, dormir moins de 7 heures par nuit pourrait nuire à la santé à travers une augmentation du risque d’obésité, de maladies cardiovasculaires et de diabète.
Qu’est-ce que le cycle du sommeil ?
Un cycle de sommeil d’environ 90 min comprend deux types : lent (ralentissement de l’activité cérébrale) et paradoxal (activité élevée du cerveau). Le sommeil est rythmé par des cellules de l’hypothalamus, formant l’horloge biologique. L’alternance veille-sommeil est régulée par :
- des rythmes physiologiques. La mélatonine régule de nombreuses hormones et sa sécrétion de nuit est régulée par la luminosité. Elle permet de s’adapter aux changements saisonniers et d’avancer ou retarder l’endormissement.
- l’adénosine, un neurotransmetteur, induirait le sommeil lors d’un éveil prolongé.
- des déterminants comportementaux et sociaux (horaires de travail, heures des repas). Le sommeil varie aussi avec l’âge.
Un tiers des français dorment moins de 6h
La restriction volontaire de sommeil est de plus en plus courante dans nos sociétés modernes. En France, d’après une enquête de l’Institut National du sommeil et de la vigilance, les français dorment en moyenne 7h par semaine (18-55 ans) et un tiers dorment moins de 6h. Environ 20 à 30% de la population dit avoir des troubles du sommeil. Pour rappel, 1 décès sur 3 sur la route est dû à un endormissement au volant. La variabilité génétique départage les petits dormeurs des gros dormeurs, ainsi que les personnes « du matin » (qui se réveille rapidement sans difficultés) et « du soir ».
D’après l’étude Nutrinet, les principaux facteurs perturbateurs du sommeil chez les deux sexes sont les bruits extérieurs, les horaires de travail, le téléphone et internet pendant la nuit. Les hommes sont un peu plus préoccupés par l’argent que les femmes en termes de perturbation de sommeil. Voici le nombre d’heures conseillées de sommeil par âge :
Comment avoir un sommeil de qualité ?
Il est conseillé d’avoir une bonne literie, une chambre agréable qui donne un sentiment de sécurité, silencieuse, l’obscurité, une température moyenne (entre 16 et 20°C), être détendu, d’éviter les excitants (café, thé, vitamine C…), ne pas pratiquer d’activité physique après 20h.
C’est également important d’être relaxé, par exemple avec des exercices de yoga, prendre un bain, écouter de la musique ou lire un livre. Éviter l’alcool, car il peut perturber le sommeil.
Des grandes études épidémiologiques associent obésité et manque de sommeil
Karine Spiegel, chercheuse à l’INSERM sur le sommeil propose le sommeil comme un autre facteur de risque de l’obésité dans cette vidéo. La méta-analyse de Francesco P. Cappuccio, l’odds ratio entre un IMC élevé et un sommeil court est de 1,55 c’est-à-dire qu’un manque de sommeil pourrait augmenter de 55% le risque d’avoir un IMC élevé. Cette méta-analyse comprend 18 pays, avec des femmes, des hommes, des gens en surpoids, obèses. Pour chaque heure de sommeil en plus, on a une diminution du risque de l’obésité de 9%.
L’étude « Nutrition et sommeil » portait sur 49 086 participants qui ont répondu à un questionnaire sur le sommeil et 3 enquêtes alimentaires. Ils ont observé un fort lien statistique entre l’insomnie et l’obésité. Par exemple, les femmes obèses de cette étude avaient un risque d’insomnie 43% plus élevée que les femmes non obèses. Par contre, il n’y avait pas de différences significatives chez les Hommes. Ils ont également retrouvé des différences entre les « courts dormeurs » et les « long dormeurs ». Au niveau de l’effet du sommeil sur le comportement alimentaire, les différences entre insomniaques et non insomniaques sont beaucoup plus ténues. Le rapport conclue en pensant qu’il y a des liens dans les deux sens entre sommeil et troubles alimentaires.
La méta-analyse de YiliWu incluant 14 études, soit 197 906 participants, a également montré qu’une durée de sommeil inférieure à 5 ou 6 heures est associée à un risque élevé d’obésité. Ils évoquent aussi les problèmes de régulation de l’appétit, la fatigue. Les personnes plus longtemps éveillée sont plus d’opportunités de manger.
Un des principales limites de toutes ces études est l’évaluation du temps de sommeil est faite par l’individu lui-même (par questionnaire). Son avis (sous-évaluation possible) peut être biaisé par la fatigue ou le stress.
Le manque de sommeil pourrait donner faim
Plusieurs études (Taheri 2006, Knutson 2007; Cedernaes 2015) ont cherché l’explication de cette association entre le sommeil et la prise de poids. Ils ont essayé de reproduire un manque de sommeil à travers l’application de nuits courtes (par exemple 6 nuits successives de 4h de sommeil dans l’étude de Knutson) et ils ont mesuré différents paramètres physiologiques. Le manque de sommeil pourrait :
- diminuer la réponse du glucose à l’insuline de 30% (hormone qui régule la glycémie)
- augmentation du taux de cortisol et de Growth Hormon (GH)
- augmentation du taux de ghréline de 28% (hormone qui favorise la prise alimentaire)
La prise de poids serait associé à des dérèglements internes du métabolisme et des balances hormonales sur le contrôle de l’appétit, mais une diminution de l’activité physique à cause de la fatigue pourrait également diminuer la dépense énergétique. Plus généralement, le surpoids est associé à un déséquilibre énergétique (plus d’apports que de dépenses énergétiques). Ce déséquilibre est la conséquence de plusieurs facteurs génétiques et environnementaux tels que le mode de vie global (régime alimentaire, activité physique, sommeil, stress…).
Sources :
Paula Alhola and Päivi Polo-Kantola – Sleep deprivation: Impact on cognitive performance – Neuropsychiatr Dis Treat. 2007 Oct; 3(5): 553–567.
Knutson KL, Spiegel K, Penev P, Van Cauter E. The Metabolic Consequences of Sleep Deprivation. Sleep medicine reviews. 2007;11(3):163-178. doi:10.1016/j.smrv.2007.01.002
Cappuccio et al – Meta-Analysis of Short Sleep Duration and Obesity in Children and Adults -SLEEP, Vol. 31, No. 5, 2008
Yili Wu, Long Zhai, Dongfeng and Zhang – Sleep duration and obesity among adults: a meta-analysis of prospective studies -Sleep Medicine 15 (2014) 1456–1462
NUTRINET-SANTE – Etude des relations entre nutrition et sommeil
http://www.inserm.fr/thematiques/neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-psychiatrie/dossiers-d-information/sommeil