Réduire la pollution de l’air intérieur
Les polluants de l’air sont des agents chimiques, physiques ou biologiques qui affectent à court ou à long terme la santé des êtres vivants (principalement par inhalation, mais aussi par contact) et des écosystèmes (en se déposant sur les sols et les végétaux ou dans l’eau. La pollution de l’air extérieur provenant des activités humaines (trafic routier, incinération à l’air libre des déchets, utilisation de pesticides en agriculture…) et de la nature (éruption volcanique, pollens…) est bien connue et elle comporte une responsabilité avérée dans les maladies respiratoires, les maladies cardiovasculaires et certains cancers.
Par ailleurs, nous passons plus de la moitié de notre journée dans un lieu fermé : au bureau, à l’école, chez soi… On pense être protégé de cette pollution en étant à l’intérieur des bâtiments, que nenni ! La qualité de l’air intérieur peut également être médiocre et nocive, à cause des appareils de chauffage et de cuisson, les peintures, les produits d’entretien, le tabagisme ou l’ameublement… Environ 4,3 millions de personnes meurent prématurément de maladies liées à cette pollution intérieure (OMS, Organisation Mondiale de la Santé 2016). Le coût socio-économique des polluants de l’air intérieur serait proche de 19 milliards d’€ annuellement (ANSES, Agence Nationale de Sécurité Alimentaire).
Les principaux polluants de l’air intérieur sont les composés chimiques volatiles, les bio-contaminants et les particules fines. L’air intérieur peut être plus pollué que l’air extérieur à cause de la multiplicité des sources de pollution et un manque d’aération, ce qui concentre les polluants dans un même lieu fermé. Les composés organiques volatiles (benzène, acétone, éthanol, toluène, butane sont souvent utilisés comme solvants, dégraissants, conservateur, agent de synthèse, agent de nettoyage, dans l’industrie). Un composé organique contient au moins un atome de Carbone avec un ou plusieurs de ces atomes : hydrogène, oxygène, phosphore, souffre, halogène ou azote. Ces composés ont un impact environnemental puisque ce sont des précurseurs de l’ozone. Une inhalation d’ozone peut provoquer de la toux, des gènes respiratoires, nasaux et/ou oculaires chez l’Homme. Une surproduction d’ozone altère également la résistance des plantes.
Réglementation : L’émission nationale de composés organiques volatiles est limitée par la directive 2001/81/CE du 23 octobre 2001, dite NEC (National Emission Ceilings).
Voici une petite infographie en guise d’introduction que j’ai faite avec le logiciel PiktoChart :
Où trouve-t-on ces polluants dans la maison ?
Le formaldéhyde et les meubles en bois aggloméré
Les meubles en bois aggloméré ou en contreplaqué sont fabriqués à partir de fines fibres ou de particules de bois que l’on a agglomérées à l’aide d’un liant souvent de l‘urée-formaldéhyde. Quand ces types de meubles sont neufs, ils peuvent émettre du formaldéhyde pendant plusieurs jours ou semaines (US EPA). Le formaldéhyde a été classé en 2004 par le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) comme cancérigène en 2004. Le formaldéhyde trouve son origine surtout dans les laques, les colles, les vernis, les encres, les résines et les produits ménagers… mais également dans les photocopieurs !
Dans ce type de meuble, on peut retrouver de l’acétaldéhyde (classé 2B agent peut-être cancérogène) suspecté entraîner des irritations des yeux et des voies respiratoires et des cancers nasaux et du larynx.
Le benzène et les produits de bricolages
Le benzène est un composé organique volatile retrouvé dans les peintures, les vernis, les colles, la moquette, le carrelage, les nettoyants ou les tissus neufs. Il est classé comme cancérogène avéré (groupe 1 du CIRC). L’inhalation est la voie principale d’exposition au benzène. En cas d’exposition chronique, il participerait aux leucémies (ANSES, Cocheo et al. 2000 ). Une exposition aigüe (inhalation d’une forte dose) provoque des troubles de la parole, des céphalées, des nausées voire une dépression du système nerveux central et respiratoire.
Les appareils de chauffage, cheminées et monoxyde de carbone
Le monoxyde de carbone est un gaz incolore, inodore et asphyxiant. Il résulte d’une combustion incomplète due au manque d’oxygène souvent dans des installations de chauffage (chaudière, chauffe-eau, cheminée…) mal entretenues. Son inhalation provoque des maux de tête, de la nausée, de la fatigue voire une asphyxie. Ces intoxications peuvent laisser des séquelles à vie. En cas d’intoxication, aérez immédiatement la pièce en ouvrant les fenêtres et les portes. Appeler les secours.
Humidité et moisissures
Les moisissures apparaissent avec l’humidité sous forme de tâches vertes ou noirâtres : dans les cuisines, la salle de bain. 14 à 20% des logements en France présentent des moisissures visibles !! La douche, la cuisine, le séchage du linge à l’intérieur produisent beaucoup d’humidité dans une pièce. Il peut également avoir des remontées d’humidité par le sol et les murs ou des infiltrations d’eau.
La légionellose
C’est une infection respiratoire non transmissible due à une bactérie (en France souvent Legionella pneumophila). Cette pathologie se transmet par des gouttelettes contenant ces bactéries. Les légionelles se développent dans les eaux stagnantes, une T° d’eau entre 25 et 45°C. Les symptômes sont de type grippaux.
Les allergènes et les tapis, moquettes…
Les acariens se développent dans les moquettes, les literies, les tapis et peuvent provoquer des rhinites, des gênes respiratoires et exacerber l’asthme.
L’amiante et le plomb dans les murs, les tuyaux…
L’amiante est un matériau fibreux utilisé pour ses propriétés d’isolation thermique et photonique. On en retrouve en poudre introduits dans les enduits, ciments, colles ou en flocage sur les murs ou plafond, en feuille pour isoler de la chaleur. L’asbestose est une accumulation de poussières d’amiante dans les poumons qui crée des troubles respiratoires et augmente le risque de cancer du poumon (cancérogène avéré par le CIRC en 2012).
L’avantage du plomb est sa résistance à la corrosion. Il était donc utilisé pour la tuyauterie, l’enrobage de câbles sous-marin. Il était aussi utilisé dans les peintures dans les immeubles construits avant 1949. Le plomb est Agent probablement cancérogène pour l’homme 2A. Le saturnisme est une intoxication au plomb qui provoque de l’anémie, des problèmes digestifs ou des retards mentaux chez l’enfant.
Produits ménagers et pesticides
Il existe une multitude de pesticides avec des formulations différentes (organophosphorés, organochlorés, carbamates, pyréthrinoïdes, triazine…). L’INSERM a effectué un bilan de la littérature scientifique sur les risques sanitaires liées à l’exposition aux pesticides en particulier chez les agricultures (expositions plus importantes) et les nourrissons/jeunes enfants. Certains pesticides sont suspectés être associés à une augmentation de certains cancers (hématopoïétique, de la prostate), la maladie de Parkinson, des malformations congénitales. Bien que ces experts n’aient pas conclu à un lien de causalité, il faut mieux s’en méfier surtout durant certaines périodes critiques du développement de l’enfant.
Le radon et le sol
Ce gaz naturel, inodore et radioactif résulte de la désintégration de l’uranium et du radium présents naturellement dans le sol et les roches. Il s’infiltre par le sol et s’accumule dans les bâtiments mal aérés. Il est surtout présent en Auvergne, en Limousin, en Franche-Comté, en Corse ou encore en Bretagne. Il provoque en France environ 1200 à 3000 cancers du poumon/an d’après l’IRSN.
Tabagisme passif
Le tabagisme passif est le fait d’inhaler des particules de tabac involontairement. En France, Santé Publique France estime à 13 millions d’adultes le nombre de fumeurs en 2016. De nombreuses personnes fument chez elle, les particules émises s’imprègnent dans les tissus ou les moquettes et sont ré-émises plus tard. La fumée du tabac contient entre autre de nombreuses substances cancérigènes ou suspectées telles que les goudrons, le pyrène, le cadmium, le toluidine, le benzopyrène.
D’après la méta-analyse de Taylor et al. (2007), le tabagisme passif augmenterait de 30% le risque pour les non-fumeurs d’avoir un cancer du poumon (RR=1.31 (1.24–1.52)).
Les particules fines PM10 PM2.5
Les PM10 ou particulate matter de 10 micromètres de diamètre sont des particules microscopiques de matière solide et/ou liquide en suspension dans l’air qui provient des activités humaines (cuisson,entretien des locaux, tabagisme, encens, bougies, …). En absence de ces sources intérieures, les niveaux de particules sont corrélés à ceux de l’air extérieur. L’inhalation de ces particules peut aggraver l’asthme, provoquer de l’inflammation dans les voies respiratoires et sur le long terme induire des pathologies respiratoires. La pollution de l’air extérieur a été classée cancérigène.
Quelques conseils :
Aérer 10 minutes par jour en ouvrant les fenêtres : cela permet de diminuer la concentration des polluants dans l’air de votre logement en apport de l’air neuf. Les polluants ne sont pas les mêmes à l’extérieur et à l’intérieur, ni dans les mêmes proportions. La ventilation permet de lutter contre l’humidité et les condensations.
Seule la réduction des émissions de polluants à la source permet en effet d’agir de façon durable
- Fumer à l’extérieur puisque les particules du tabac restent dans les moquettes, tissus et sont ré-émises plus tard.
- Éliminer les poussières régulièrement. Utiliser des aspirateurs avec des filtres HEPA (Hautes Efficacité pour les Particules Aériennes). Limiter les tapis, moquettes qui favorisent l’accumulation de poussières et d’acariens.
- Entre 400 Bq/m² et 1000 Bq/m² de radon, il faut améliorer la ventilation et empêcher que le gaz n’entre dans le logement. Au-delà de 1000 Bq/m² des travaux plus importants doivent être entrepris.
- Éviter les bougies parfumées, les sprays, l’encens qui mettent en suspension des particules toxiques.
- Éviter d’utiliser les pesticides pour les plantes d’intérieur à l’intérieur de la maison.
- Pour éviter les allergènes : changer souvent la literie, aérer régulièrement, laver les animaux, éliminer les poussières et les acariens des moquettes et tapis.
- Pour éviter l’humidité et les moisissures, après une douche : ouvrir la fenêtre. Quand on cuisine, utiliser une hotte aspirante ou mettre un couvercle. Étendre le linge à l’extérieur ou dans une pièce bien ventilée.
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Source :
Spengler JD, Sexton K – Indoor air pollution: a public health perspective – Science. 1983 Jul 1;221(4605):9-17.
Cocheo et al. – Urban benzene and population exposure – Nature 404, 141-142 (9 March 2000) | doi:10.1038/35004651
ANSES – Qualité de l’air intérieur (23/11/2016) – https://www.anses.fr/fr/content/qualit%C3%A9-de-l%E2%80%99air-int%C3%A9rieur
ANSES – OQAI – CSTB – Étude exploratoire du coût socio-économique des polluants de l’air intérieur – Avril 2014 – https://www.anses.fr/fr/system/files/AUT-Ra-CoutAirInterieurSHS2014.pdf
ADEME – Les composés organiques volatils (29/08/2014) http://www.ademe.fr/entreprises-monde-agricole/reduire-impacts/reduire-emissions-polluants/dossier/composes-organiques-volatils-cov/definition-sources-demission-impacts
US EPA – Controlling Pollutants and Sources: Indoor Air Quality Design Tools for Schools – https://www.epa.gov/iaq-schools/controlling-pollutants-and-sources-indoor-air-quality-design-tools-schools
Ministère de l’environnement – Sources de pollution (2012) – http://www.developpement-durable.gouv.fr/Sources-de-pollutions.html
OQAI – http://www.oqai.fr/userdata/documents/238_DESCRIPTIF_DES_SUBSTANCES_OU_PARAMETRES_MESURES.pdf
IARC – List of Classification http://monographs.iarc.fr/ENG/Classification/latest_classif.php
Ministère de la santé – La Légionellose – http://social-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/article/legionellose
Je vous remercie pour cet article très complet