40% des cancers évitables par la prévention : le tabac et le surpoids sont les principaux facteurs de risque
D’après le Cancer Research UK, un institut indépendant de recherche sur le cancer au Royaume-Uni, environ 38% des cancers (soit 135 507 cancers sur les 359 547 cancers incidents au Royaume-Uni) pourraient être évités en adoptant un mode de vie plus sain en 2015. Le tabac et le surpoids seraient les principaux facteurs attribuables à la survenue de cancers d’après cette étude publiée dans le British Journal of Cancer.
Les cancers sont l’une des principales causes de mortalité dans le monde (OMS) avec 14,1 millions de cas incidents de cancer dans le monde en 2012 et 385 000 cas incidents de cancers en France en 2015 (INCa 2015).
La prévention constitue l’approche de santé publique sur le long terme la plus efficace et rentable.
Qu’est-ce que le cancer ?
Quand on évoque le cancer, il faut parler d’un type de cancer avec sa localisation. Les cancers sont des maladies multifactorielles, c’est-à-dire que les causes sont multiples. La plupart des cancers résulte d’interaction gènes-environnement. Seuls 5 à 10% des cancers seraient liés à des prédispositions génétiques comme la mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2 pour le cancer du sein. Attention avoir cette mutation ne veut pas dire que l’individu va forcément développer un cancer du sein.
La cancérogenèse est le processus de développement d’un cancer qui passe par :
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l’initiation : une altération du génome d’une cellule dérégule (mutations ou modifications épigénétiques) le cycle de cellulaire.
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la promotion tumorale : c’est une phase longue où la cellule altérée va proliférer et conduire au développement de clones de cellules mutées.
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la progression tumorale : cette phase correspond à l’accumulation d’anomalies du génome, à la vascularisation de la tumeur et à l’acquisition de la capacité d’invasion avec formation des métastases.
Étude des facteurs de risque du cancer
Deux principales approches pour étudier la prévention du cancer sont possibles :
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la part des cancers attribuables aux facteurs environnementaux (dont l’alimentation). Cette fraction de cancer attribuable est la proportion de cas de cancers attribuables à une exposition sur l’ensemble des cas dans la population. On parle de Population Attributable Fractions « PAFs ».
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la part des cancers évitables par la prévention. La fraction évitable est la proportion de cas évitable si on supprime l’exposition.
Le risque attribuable indique le nombre de malades parmi les personnes qui ont été exposées à un facteur et qui peuvent être attribués à cette exposition. La part attribuable des cancers (PAF) dépend de la force de l’association entre l’exposition et le cancer et également de la prévalence de l’exposition dans la population.
p1 est la proportion de la population exposée au facteur 1.
ERR1 est l’Excès de Risque Relatif ERR (= Risque Relative – 1) pour le facteur 1. Le Risque Relatif (RR) mesure le risque de survenue du cancer dans un groupe exposé par rapport à un autre non exposé. Il met en évidence une association entre un facteur de risque/préventif et la maladie étudiée.
Objectif de l’étude anglaise
L’objectif de l’étude était d’estimer le pourcentage de cancers attribuables à un facteur environnemental ou un comportement au Royaume-Uni. Les données de prévalence d’exposition dataient de 2005 et celles de survenues des cancers de 2015 afin d’avoir un temps de latence (temps entre l’exposition et le développement de la maladie) d’environ 10 ans.
Le choix des facteurs environnementaux retenus s’est fait à partir d’une recherche de la littérature scientifique en Avril 2017 sur les facteurs de risque classification par l’IARC (International Agency for Research on Cancer) ou le WCRF (World Cancer Research Fund International) comme « suffisant » ou « convaincant » pour participer dans une association causale avec le cancer.
Les facteurs de risque étudiés étaient le tabagisme, le surpoids/l’obésité, les infections, les radiations UV et ionisants, une consommation insuffisante en fibres (moins de 30g/j), l’alcool, la viande transformée, le manque d’activité physique, le non allaitement, le manque d’activité physique (moins de 150 minutes d’activité physique modérée par semaine), la contraception orale et les hormones pour la ménopause.
Les facteurs de risque modifiables des cancers
Au Royaume-Uni, en 2015, 4 cancers sur 10 (soit 37,7%) sont attribuables à des facteurs de risques connus. Le tabac et l’obésité sont les principaux facteurs de risque. Fumer contribue tout particulièrement à la survenue du cancer du poumon (72.2%) et du larynx (64%). L’obésité contribue à 34% des cancers de l’utérus chez les femmes et 31.1% de l’œsophage pour les hommes par exemple.
Les limites de cette étude anglaise sont que l’on ne peut pas obtenir des intervalles de confiance pour quantifier les incertitudes des estimations. Le temps de latence de 10 ans est court par rapport au temps de développement de certains cancers. Par exemple, les effets du tabac pourraient se faire ressentir 20 ans plus tard pour le cancer du poumon. Les effets d’interaction ou synergiques entre les facteurs environnementaux ainsi qu’avec les facteurs génétiques n’ont pas été pris en compte. Les données de prévalence de la pollution de l’air datent de 2010. Il y a également des difficultés à quantifier l’exposition avec certitude. Les risques relatifs utilisés ne proviennent pas toujours de méta-analyses (plus haut niveau de preuves).
Aux USA, la part des facteurs environnementaux modifiables attribuables aux cancers était de 42% en 2014, 40.8% à Alberta au Canada en 2012 et 31,9% en Australie en 2010.
En France, le Centre International contre le Cancer (CIRC/IARC) a constaté qu’en 2000, le tabac pourrait être attribué à 18,2% des cancers, l’alcool à 8,1% des cancers et les agents infectieux à 3,3% des cancers.
Le WCRF a constaté par ailleurs que le surpoids, l’alcool et la viande transformée sont associés à certains cancers avec un niveau de preuve scientifique convaincant.
Le tabac est un des facteurs de risque majeur des cancers du poumon, de la bouche et du larynx.
L’exposition professionnelle comprend l’exposition à l’amiante, aux amines aromatiques, au benzène et dérivés. En population générale, l’arsenic, la pollution de l’air (en particulier les particules fines), les aflatoxines, les biphényls polychlorés, le radon et les métaux lourds sont également des facteurs de risque du cancer.
La consommation de viande rouge et transformée est associée à un risque de cancer colorectal.
L’obésité est associée à un risque accru de cancer colorectal, du sein (pour les femmes ménopausées), de l’endomètre, des reins, de l’œsophage et du pancréas. L’alcool concerne plus les cancers du foie, du sein, de l’estomac et colorectal.
Les agents infectieux cancérigènes sont la bactérie Helicobacter pilori (cancer de l’estomac), les virus du papillomavirus humain (HPV), des hépatites B et C. Les niveaux optimaux d’exposition sont ceux qui pourraient faire diminuer le risque de cancer.
Quelques pistes de prévention :
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Ne pas consommer d’alcool (ou limiter)
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Ne pas fumer ou arrêter de fumer
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Pratiquer une activité physique au moins 30 minutes par jour
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Avoir une alimentation diversifiée, riche en produits céréaliers complets, fruits et légumes pour les apports en vitamines, éléments minéraux et antioxydants.
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Sources :
Brown K.F. et al. The fraction of cancer attributable to modifiable risk factors in England, Wales, Scotland, Northern Ireland, and the United Kingdom in 2015. British Journal of Cancer (January 2018)
Vineis P. et al. Global cancer patterns: causes and prevention. Lancet. 2014 Feb 8;383(9916):549-57
Key T.J. et al. The effect of diet on risk of cancer. Lancet. 2002 Sep 14;360(9336):861-8
Islami F. et al. Proportion and number of cancer cases and deaths attributable to potentially modifiable risk factors in the United States. CA Cancer J. Clin. (2017)
Grundy, A. et al. Cancer incidence attributable to lifestyle and environmental factors in Alberta in 2012: summary of results. CMAJ Open 5, E540–E545 (2017)
Whiteman, D. C. et al. Cancers in Australia in 2010 attributable to modifiable factors: summary and conclusions. Aust. NZ J. Public Health 39, 477–484 (2015).
ANSES – Rapport d’expertise collective Nutrition et cancer. Légitimité de recommandations nutritionnelles dans le cadre de la prévention des cancers (Mai 2011)
World Cancer Research Fund International/American Institute for Cancer Research. Continuous Update Project: Diet, Nutrition, Physical Activity and the Prevention of Cancer. Summary of Strong Evidence. Available at: wcrf.org/cupmatrix accessed on 24-03-2018
Institut National du Cancer www.e-cancer.fr/
WHO – ATTRIBUTABLE CAUSES OF CANCER IN FRANCE IN THE YEAR 2000
Bonjour, pour l’allaitement, c’est l’enfant ou la mère qui est « protégé »?
Merci pour votre excellente question : le risque de cancer du sein chez les mères allaitantes diminuerait de 2% pour chaque période de cinq mois d’allaitement, selon 13 études sur les 18 analysées au total par l’American Institute for Cancer Research (AICR). Page 87 de ce rapport : http://www.aicr.org/continuous-update-project/reports/breast-cancer-report-2017.pdf
Bonjour,
Sur le graphique, qu’est ce que désigne le terme « occupation » ?
Bonjour merci de votre question pertinente. « Occupational cancer » correspond aux cancers d’origine professionnelle, suite à l’exposition à une substance cancerigène au travail. Par exemple les métiers de peintre et de soudeur, également dans l’industrie chimique, du bois, de la métallurgie, de la plasturgue ou du bâtiment sont plus à risques.