Le régime méditerranéen diminuerait la sévérité de la dépression chez les jeunes adultes d’après un essai clinique Australien
Un essai clinique Australien publié dans le journal AJCN en Avril 2022 montre que suivre un régime méditerranéen chez des jeunes hommes dépressifs pourrait améliorer leur qualité de vie et diminuer la sévérité de leur dépression.
La mise en place de l’étude
75 participants ont été recrutés dans l’essai clinique entre Mars 2020 et Août 2021. 3 participants (1 dans le groupe contrôle et 2 dans le groupe d’intervention) ont quitté l’essai en cours de route. Le but de l’étude était d’évaluer l’impact de conseils diététiques (rdv de 1h avec un diététicien), des kits d’information et d’un bon d’achat de $50 suggérant de mener un régime méditerranéen (riche en légumes, légumineuses, céréales complètes, poissons gras, huile d’olive et fruits à coque non salés). L’essai a duré 12 semaines. Le groupe comparatif contrôle avait une session d’une heure de discussions sur des centres d’intérêt neutres (film, sport, hobbies) et ils recevaient également $50 de carte cadeau.
Les participants ont aléatoire été assignés au groupe d’intervention (régime méditerranéen) ou de contrôle (discussions).

L’adhésion au régime méditerranéen a été mesurée avec un score méditerranéen (MEDAS) qui consistent en un questionnaire scorant 15 items alimentaires représentatifs du régime en 0 (non consommé) ou 1 (consommé). Un score de 15 indiquait une adhésion maximale au régime méditerranéen.
La sévérité de la dépression était évaluée par l’inventaire de dépression de Beck (BDI-II), qui est un questionnaire avec 21 questions : score de ≤9 points = score normal ; 10-18 points=dépression légères ; 19-29 points = dépression modérée ; ≥30 points = dépression sévère.
La qualité de vie était évalué avec un questionnaire de 26 questions élaboré par l’OMS.
Résultats
La moyenne d’âge des participants était de 22 ans et 71% étaient nés en Australie. 45% des participants voyaient un psychologue et 35% prenaient des médicaments contre la dépression. Le score moyen au début de l’étude de dépression était de 34,8 dans le groupe « régime méditerranéen » et de 33,5 dans le groupe contrôle.
Le score d’adhésion au régime méditerranéen a augmenté de +8 points dans le groupe d’intervention vs +0,2 points dans le groupe contrôle entre le début de l’étude et la 12ème semaine. A 12 semaine, la différence entre le groupe d’intervention et contrôle était de 7,8 points (p<0,001).

La diminution de la sévérité de la dépression était plus importante dans le groupe du régime méditerranéen (-20,7 points) vs -6,2 points dans le groupe contrôle. A 12 semaines, il y avait une différence du score de la dépression de 14,4 points.

De même, le régime méditerranéen s’accompagnait d’une amélioration de la qualité de vie des participants.

La force de cette étude est son design d’essai randomisé contrôlé bien qu’il n’était pas possible de faire une double aveugle. Les limites comprennent notamment le faible nombre de participants et la durée de suivi courte ce qui empêche de voir les effets sur le long terme. Il y avait également des différences au début de l’étude dans l’utilisation des antidépresseurs (31% dans le groupe d’intervention vs 41% dans le groupe contrôle) mais il n’aurait pas été éthique de les empêcher de prendre leurs médicaments. Un écueil est également de ne pas avoir présenter d’analyses en « intention de traiter ». Ici, les analyses sont « per protocole » à partir du nombre final de participants qui ont suivi en entier l’essai clinique. Les analyses en intention de traiter font référence à des analyses se basant sur les participants randomisés (répartis aléatoirement dans les groupes).
Deux autres essais cliniques similaires (SMILES et HELFIMED) ont montré respectivement qu’un suivi diététique et un régime méditerranéen améliore la santé mentale.
Les mécanismes expliquant les relations alimentation-santé mentale
Les processus métaboliques et cellulaires reliant l’alimentation et la santé mentale suspectés sont nombreux et ils ne sont pas clairement caractérisés. Par exemple, le régime méditerranéen pourrait modifier la composition du microbiote intestinal qui pourrait jouer dans la régulation du métabolisme de la sérotonine (hormone du plaisir) et jouer sur les réponses au stress et aux troubles affectifs. La composition du microbiote est aussi différente chez les personnes atteintes de maladies psychiatriques vs non malades (les personnes dépressives avaient plus d’entérobactéries dans une étude). Le régime méditerranéen pourrait faire diminuer l’inflammation, or environ 25% des patients atteints de troubles neuropsychiatriques,y compris les troubles de l’humeur et la schizophrénie, présentent une augmentation des niveaux d’inflammation (cytokines…) (Kim 2002). J’en avais parlé plus en détails dans ma vidéo Youtube sur l’alimentation et la santé
Sources : Bayes, Jessica et al. “The effect of a Mediterranean diet on the symptoms of depression in young males (the « AMMEND » study): A Randomized Control Trial.” The American journal of clinical nutrition, nqac106. 20 Apr. 2022
Jacka, F.N., O’Neil, A., Opie, R. et al. A randomised controlled trial of dietary improvement for adults with major depression (the ‘SMILES’ trial). BMC Med 15, 23 (2017)
Parletta, Natalie et al. “A Mediterranean-style dietary intervention supplemented with fish oil improves diet quality and mental health in people with depression: A randomized controlled trial (HELFIMED).” Nutritional neuroscience vol. 22,7 (2019): 474-487
Kim YK, Suh IB, Kim H, Han CS, Lim CS, Choi SH, Licinio J. The plasma levels of interleukin-12 in schizophrenia, major depression, and bipolar mania: effects of psychotropic drugs. Mol Psychiatry. 2002;7(10):1107-14. doi: 10.1038/sj.mp.4001084. PMID: 12476326.