Étiquetage nutritionnel : Nutri-Score 5-C, vainqueur de la guerre des logos nutritionnels et bientôt dans vos supermarchés?

obesite chiffres surpoids franceDepuis plusieurs années, l’efficacité et le choix d’un système d’étiquetage nutritionnel est débattu. Le Règlement n°1169/2011 appelé INCO avait rendu la déclaration nutritionnel obligatoire à partir du 13 décembre 2016. L’étiquetage nutritionnel a des enjeux à la fois sanitaires et économiques.

En Mars 2015, le ministère des Affaires sociales et de la Santé avait lancé un débat sur les logos nutritionnels. En septembre 2016, une étude grandeur nature avait été menée dans plusieurs magasins pour évaluer quel est le système d’information nutritionnelle le plus efficace pour orienter vers des comportements bénéfiques pour la santé. Cette expérimentation s’inscrivait dans le cadre de la loi du 26 janvier 2016 relative à la modernisation de notre système de santé. Ce 15 Mars 2017, les résultats sont tombés : le Nutri-score a été évalué comme le plus efficace pour influencer le choix des consommateurs vers une alimentation plus saine et équilibrée.

Le but d’un logo nutritionnel est de diminuer l’incidence de pathologies dans la population générale par les choix alimentaires. Il existe des systèmes d’information nutritionnel descriptifs qui présentent des teneurs en nutriments à l’aide de chiffre et des systèmes d’information nutritionnels interprétatifs qui traduisent une qualité nutritionnelle (déterminé par un score). Il existe également des systèmes hybrides. Comment ont été construits ces scores ? Quelles sont leurs différences ? Qu’est-il débattu ?

Quatre logos nutritionnels testés

Le Nutri-score

logo nutritionnel Nutri-score etiquetageCe logo interprétatif est basé sur 5 couleurs avec 5 lettres. La couleur verte avec le A représente la meilleure qualité nutritionnelle que le produit avec la couleur rouge. Ce score, proposé par l’ équipe de recherche EREN (Julia et al.) dirigé par Serge Hercberg se base sur une échelle de qualité nutritionnelle. Cette méthode est fondée sur les critères de la FSA (Food Standard Agency). Pour 100g d’aliment, ce score se base sur la différence entre 2 sommes de points :

  • des items négatifs (N) : énergie (kJ), sucres simples (g), acides gras saturés (g) et sel (mg) . Un score de 1 à 10 est attribué à chacun des items. Cette somme va théoriquement de 0 à 40.
  • des items positifs (P) : fibres (g), protéines (g), teneur en fruits ou légumes/noix (%). Un score de 0 à 5 points leur est attribué à chacun. Cette somme va théoriquement de 0 à 15.

Le calcul du Nutri-score varie selon la somme (N) des points des items négatifs :

  • Si N<11, Nutri-score = N-P
  • Si N>=11, Nutri-score = N-P mais les protéines ne sont pas prises en compte dans le score des items positifs.

Le Nutri-score va donc de -15 à 40. Voici les correspondances couleurs :  -15 à -2 : vert         -1 à 3 : vert clair     4 à 11 : jaune        12 à 16 : orange  Plus de 17 : rouge

Par conséquent, une augmentation du Nutri-score revient à une diminution de la qualité nutritionnelle de l’aliment. Des exceptions pour certains aliments :  les eaux minérales et de source non aromatisées sont classées en vert. Les boissons light seront forcément orange (et non vert même si leur score les classe ainsi), mais des adaptations de calcul sont à l’étude. Des points différents sont attribués aux matières grasses en fonction de leurs teneurs en acides gras saturés.  Pour les fromages, la teneur en protéines est prise en compte même si N ≥ 11.

Ce système est similaire à celui utilisé dans certains pays scandinaves et aux pays bas.

Le système SENS ‘Système d’Étiquetage Nutritionnel Simplifié’

logo SENS nutritionnel score ANIA industriels

Ce score se base sur le système SAIN-LIM présenté dans le rapport de l’AFSSA (2008) sur les profils nutritionnels. Le profilage nutritionnel consiste à classer les aliments en fonction de leur qualité nutritionnelle globale. Ce logo est soutenu par la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD) et l’ANIA (Association Nationale des Industriels Alimentaires). Ce score se calcule en 4 étapes :

1ème étape: la détermination des catégories d’aliments :

catégorie alimentaire logo SENS ANIA

Pour les aliments composés, la catégorie est attribuée d’après la liste des ingrédients selon l’annexe  8 du  règlement INCO  relative  à  l’indication  quantitative  des  ingrédients.

Choix des items à utiliser dans les calculs :

choix item nutriment logo score SENS

2ème étape : application de seuils minimaux et maximums pour chaque catégorie d’aliments

3ème étape : calcul du SAIN et LM

Les scores SAIN et LIM changent selon la catégorie alimentaire puisqu’ils n’intègrent pas tous les mêmes items.

formule score SAIN LIM générique nutritionnel

n=nombre de nutriments qualifiants sélectionnés

Energie en kcal/100g du produit

Nut i : quantité du nutriment i dans 100g d’aliment

Recoi recommandation journalière d’apport en nutriment i exprimée dans le même unité que Nutrimenti

formule score LIM générique nutritionnel

Disi est la quantité du nutriment disqualifiant i dans 100g d’aliment.

Maxi est la recommandation d’apport journalier maximum en nutriment i

Dans le cas des boissons, le LIM est multiplié par 2.5. Les nutriments qualifiants sont : les protéines, les fibres, le calcium Les nutriments disqualifiants sont : le sodium, les acides gras saturés et les sucres libres.

4ème étape : attribution d’une classe de référence :

categories SENS logo SAIN LIM correspondance

Puis certains produits sont reclassés : par exemple les eaux sont automatiquement classées en 1. Les boissons light (peu calorique) sont déclassées en 2. Chaque classe est associée à une fréquence de consommation : très souvent, souvent, modérément et occasionnellement.

Nutri-repère logo score etiquetage nutritionnelLe Nutri-repère

Il correspond à un système descriptif des RNJ (Repère Nutritionnel Journaliers) ou GDA (Guideline Daily Amounts) qui montre par des colonnes la contribution en pourcentage et valeur absolue d’une portion d’aliment par rapport aux apports nutritionnels de référence en énergie, matières grasses dont acides gras saturés, sucres et sel (Hawley, 2012).

Le Traffic-Lights

traffic light food labelling logo FSA nutritionnel

Ce logo hybride a été mis en place au Royaume-Uni par la FSA (Food Standard Agency). Comme un feu tricolore, il se base sur une échelle de 3 couleurs. Pour 4 nutriments (sucres ajoutés, matières grasses, acides gras saturés  et sel) des seuils sont définis afin de les classer en trois couleurs : rouge (high), orange (medium) et vert (low).

La valeur absolue et le pourcentage par rapport aux apports recommandés sont indiqués par portion et pour 100g ou 100 mL de produit.

Les résultats de l’expérimentation

L’étude demandée par le ministère de la santé en France s’est déroulée dans 60 supermarchés dans 4 régions de France pendant 10 semaines en conditions réelles d’achat avec 809 participants.

  • Le nutri-couleurs, le nutri-score et SENS entraînent des modifications significatives du comportements d’achat des consommateurs.

  • Le nutri-score est le plus efficace en particulier sur les consommateurs qui achètent le moins cher.

Les logos nutritionnels jugés inefficaces selon l’ANSES

L’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a publié le 14 février 2017 son avis scientifique. L’agence a critiqué plusieurs points :

  • ces logos nutritionnels ne prennent pas en compte toutes les variables pertinentes par rapport aux enjeux de santé publique liés à l’alimentation. Les logos interprétatifs ne permet pas au consommateur de retrouver quel(s) nutriment(s) est à l’origine du déséquilibre de l’aliment. Les valeurs de référence nutritionnelle sont celles définies par la réglementation (AQR), ces seuils ne sont pas spécifiques pour le sexe, l’âge, le statut physiologique et l’activité physique (les ANC seraient plus précis). Les logos ne prendraient pas en compte toute la variabilité de population.

  • les systèmes d’informations nutritionnelles ne prennent pas en compte toute la complexité de l’alimentation : au niveau global (régime alimentaire), des aliments consommés, des apports en nutriments, autres substances et contaminants. Les teneurs en nutriments du produit sont évaluées par rapport à des valeurs de références et le logo ne tient pas compte du niveau de consommation de l’aliment et donc de sa contribution à l’apport total en nutriment dans le régime.

  • effets contreproductifs : les aliments avec une pastille verte pourrait être surconsommés alors que ceux en rouge seraient exclus.

L’ANSES met en plus en avant 2 limites majeures : les aliments ne peuvent pas se compenser avec la note que leur attribue le logo. On ne sait pas l’élaboration d’un régime alimentaire global à partir des systèmes d’information nutritionnelle peut répondre aux repères de consommation alimentaire. L’agence conclue que les logos nutritionnelles ne sont pas adaptés pour répondre aux enjeux de santé publique.

La guerre des logos nutritionnels

Le Nutri-score était soutenu par 251 495 citoyens signataires ainsi que la communauté scientifique et des associations de consommateurs tels que UFC-Que Choisir. Les sociétés d’experts spécialisés (Société Française de santé publique, société française de pédiatrie, de cardiologie…) ont signé une lettre ouverte adressée au ministère de la santé pour mettre en place le Nutri-Score 5-C. Ils mettent en avant sa facilité de compréhension, la transparence de la construction du score, son objectivité, sa capacité à aider les gens à faire de meilleurs choix alimentaires. Et ils estiment que cela incitera les industriels à améliorer la qualité nutritionnelle de leur produit.

Ce score était critiqué par l’ANIA (Association Nationale des Industriels Alimentaires) et la FCD (Fédération du Commerce et de la Distribution) dénonçant une approche simplificatrice, stigmatisant pour la consommateurs, une menace économique, les tailles de portion non prise en compte ainsi que les fréquences de consommation.

Cependant malgré tout, le logo nutritionnel reste facultatif.

health rating star australia logo nutritionnelUn autre logo utilisé en Australie

Le Health Star Rating est un système qui aide les consommateurs à discriminer les aliments au sein d’une catégorie alimentaire et entre les catégories alimentaires. Le score varie d’une ½ étoile à 5 étoiles (le plus sain)  avec une note de 0.5 à 5. Le teneur énergétique pour 1 portion et 100g ou 100mL est indiquée ainsi que 3 nutriments : lipides saturés, sucres et sodium (+ des items optionnels). Il se base sur l’énergie, la graisse saturée, le sel et les sucres totaux ainsi que des items positifs tels que la teneur en fruits et légumes, en fibres et en protéines pour 100g ou 100mL.

Applicable sur certains produits :

Ce logo n’est pas applicable à l’alcool et aux produits diététiques ou n’apportant pas d’éléments nutritifs (vinaigre, herbes, thé, café, ingrédients, etc). Ce système est volontaire et ce sont les entreprises qui calculent le score.

Et vous qu’en pensez-vous ? Pour ou contre un système d’information nutritionnelle ?

Si l’article t’a plu ou si tu souhaites suivre des sujets d’actualités controversés, un petit like :

Sources :

Julia et al. – Discriminating nutritional quality of foods using the 5-Color nutrition label in the French food market: consistency with nutritional recommendations – Nutrition Journal 2015 14:100 DOI: 10.1186/s12937-015-0090-4

Hawley et al. – The science on front-of-package food labels – Public Health Nutr. 2013 Mar;16(3):430-9. doi: 10.1017/S1368980012000754. Epub 2012 Mar 22.

AVIS de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail relatif à « l’analyse de la pertinence en matière de nutrition de systèmes d’information nutritionnelle destinés  au consommateur » – 31 Janvier 2017  https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2016SA0017.pdf

Food Standard Agency – Food Labels, more informed choices – http://tna.europarchive.org/20120419000433/http://www.food.gov.uk/multimedia/pdfs/foodlabels0808.pdf

Guide for industry to the Health Star Rating Calculator (HSRC) – Version 5 June 2016 – http://healthstarrating.gov.au/internet/healthstarrating/publishing.nsf/Content/E380CCCA07E1E42FCA257DA500196044/$File/Guide%20for%20Industry%20to%20the%20HSR%20Calculator%20v5%20June%202016.pdf

ANSES – Définition de profils nutritionnels pour l’accès aux allégations nutritionnelleset de santé : propositions et arguments https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT-Ra-Profils.pdf

http://social-sante.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/marisol-touraine-se-felicite-des-resultats-des-etudes-sur-l-impact-d-un-logo

 

 

3 réflexions sur “Étiquetage nutritionnel : Nutri-Score 5-C, vainqueur de la guerre des logos nutritionnels et bientôt dans vos supermarchés?

  • 27 mars 2017 à 11 h 10 min
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    Difficile de s’engager sur ce débat pour ma part. Le système d’information nutritionnel ne devrait être qu’un complément à une éducation alimentaire qui n’est plus dispensée en famille ou à l’école. Il y a encore des personnes qui achètent des carottes rapées toutes faites non par manque de temps mais parce qu’elles ne savent pas faire !!! (si si j’en ai rencontré).
    Aujourd’hui on entend de tout sur l’équilibre alimentaire et ce que nous devrions manger…. Un discours homogène ne ferait pas de mal.
    Sans compter que baisser l’influence des lobbys alimentaires sur nos hommes politiques ne feraient pas de mal non plus !!! Et qu’ils arrêtent de nous menacer de pertes d’emplois : on produit bien plus d’emplois en achetant local qu’en achetant des produits chez Nestlé !!! En local, un petit producteur qui se développe crée un emploi chez lui…dans une multinationale, un marché qui se développe crée une nouvelle ligne de production automatisée à l’autre bout du monde…

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  • 28 mars 2017 à 9 h 06 min
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    J’ai eu l’honneur de participer aux premiers sondages il y a de nombreuses années déjà. J’ai tout de suite adhéré au principe général. Concernant le choix parmi les différents systèmes, je trouve que c’est bien d’avoir choisi le plus simplifié. Personnellement, j’aime bien avoir le plus d’informations possible et si j’avais été le seul consommateur sur Terre, j’aurais préféré un NutriRepères ou Traffic Lights (même si les couleurs sont moisies pour les daltoniens). Mais dans la vraie vie, quand je communique des informations à mes collègues, à mon entourage, quand je développe un site web, j’ai pu constater qu’il s’avère que dès qu’on excède une très faible quantité d’informations, on sature la majorité des personnes ciblées. Du coup, si on peut trouver le NutriScore déresponsabilisant, il simplifie le message et le rend plus percutant. Libre aux curieux de compulser la liste des ingrédients pour identifier la source d’empoisonnement.

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    • 28 mars 2017 à 11 h 13 min
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      Merci ton avis 🙂 j’aime également avoir plus d’informations mais après je viens d’une formation en nutrition..

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